mardi 24 décembre 2013

Le Roman Feuilleton

Aventures vénitiennes
L'Alcyon de Nanard

Interlude: Près de Rosalie... 



Sensass. La journée avait été... Non, il n'y avait pas d'autre mot : sensass !

Au cœur de la nuit, Nanard n'en revenait pas de la chance qui s'était offerte à lui en ce beau samedi estival, aéré malgré la chaleur. Entre deux directions de colo, Nanard était repassé à Limoges pour prendre ses nouveaux quartiers à l'Ecole Normale.

Tout avait commencé lorsqu'entrant dans la chambre à deux lits qui serait sa résidence principale pendant quelque temps, il y avait découvert, en train de ranger ses propres affaires, le grand « Boucha ». Boucha, c'était un de ses copains « pantins » de Gay-Lu qui, comme lui, avait réussi le concours de l'école normale. Et la perspective de faire chambre commune avec ce grand échalas, presque un double-mètre, ne pouvait que ravir Nanard.

Mais ce n'était que le début.

Tout de go, son camarade l'avait entraîné sur le trottoir pour lui présenter avec fierté sa toute nouvelle acquisition : sa première auto, une bonne vieille Rosalie Torpedo à la couleur indéfinie... Cet achat, il allait le célébrer le soir même, dans la maison de ses parents, à la campagne, à Landouge. Nanard y retrouverait quelques bons copains du lycée... Mais aussi, paraissait-il, quelques jolies surprises.

Nanard avait bien une idée de ce que seraient ces surprises : des filles. Bon, lui, les filles, il aimait bien, ce n'était pas la question... Mais il était obnubilé par cette jolie brunette qu'il croisait chez sa voisine. Cela dit, il n'était pas question de gâcher le plaisir d'une soirée sensass entre copains... Et encore moins celui de faire une entrée remarquée, cheveux au vent, au guidon de son Alcyon flambant neuve !

Son arrivée fut en effet mémorable. A peine avait-il béquillé son engin, que le grand Boucha insista pour lui présenter les quelques jeunes filles invitées. En fait, toutes ces demoiselles étaient des futures collègues, qui se préparaient à intégrer l'Ecole Normale de Filles. D'un coup, il se sentit défaillir en reconnaissant sa voisine occasionnelle ; cette brunette aux yeux d'un bleu lumineux.

Se tournant vers lui, elle lui adressa immédiatement un sourire franc : « Mais je te connais ! tu habites près de chez ma tante... Tu t'appelles Nanard, c'est bien ça ? » Le jeune homme ne savait plus où se mettre, ni quoi dire. « Moi, c'est Gilou », poursuivit la jeune fille, avant d'ajouter : « elle est chouette, ta moto ».

Sensass.
Le grand Boucha n'aurait pas pu lui faire plus beau cadeau. Se ressaisissant à grand peine, Nanard parvint à bafouiller quelques mots convenus à Gilou, avant de saluer les autres invités. Mais son attention était captée, d'autant plus que sa jeune collègue semblait manifester un certain intérêt pour lui.


Peu à peu, il se détendit, et profita de la soirée. Plus exactement, il profita pleinement de la présence de Gilou, au mépris des activités et de tous les autres participants, conquis qu'il était par l'énergie, le sourire et le naturel de la jeune femme. Pour sa part, elle ne le quitta pas d'une semelle. Un moment presque parfait.

Juste sensass.

Mais le cœur de la nuit était maintenant bien dépassé et l'heure approchait de rentrer. Après avoir longuement hésité, Nanard proposa timidement à Gilou de la raccompagner sur sa bécane. A sa grande surprise, elle accepta immédiatement, et il était tellement ému qu'il ne remarqua pas qu'elle rougissait légèrement.

Ils prirent alors congé de leurs camarades, et Nanard fit scrupuleusement mine de ne pas remarquer le regard appuyé, lourdement entendu que lui adressait le grand Boucha. Le jeune homme aida Gilou à endosser sa veste, et lui ouvrit galamment la porte. Il s'imaginait déjà traversant la ville endormie avec la jeune femme tendrement accrochée à lui...

C'est sans doute pour cela que lorsqu'il sortit à son tour, il ne remarqua pas de suite ce qui clochait. C'est Gilou qui le sortit de son rêve éveillé : « mais elle est où, ta moto ? »

Dégringolant d'un coup dans la réalité, Nanard n'essaya même pas de masquer son effarement. Il en était sûr, il l'avait garée juste contre ce poteau, près de la Rosalie. En panique, il chercha bien un peu plus loin sur la route, mais il fallait se rendre à l'évidence : l'Alcyon avait disparu.

Envolés, les rêves prometteurs de tendre randonnée, les envies de camping, la liberté de donner rendez-vous...

Ah ouais, elle était sensass, la fin de soirée...


A suivre ...


© - France – 2013 – Bruno Deléonet pour Scotapowa Rumble – 06 87 16 82 38 – bruno.ledm@gmail.com

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire